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Pour un développement du tourisme culturel : exemple de la wilaya de Souk Ahras par Amel HADJ HAMOU- M’HARI

Située sur les hauts plateaux de l’est algérien, au sud-est de Annaba, la wilaya de Souk Ahras est délimitée au nord par celle d’El Tarf, au nord ouest par celle de Guelma, au sud par les wilayas de Tébessa et d’Oum el Bouaghi, et à l’est par la Tunisie. Très riche en vestiges archéologiques, surtout antiques , cette wilaya comprend plusieurs sites majeurs, ainsi que des monuments inscrits sur la liste du patrimoine national. La ville Souk Ahras, chef lieu de la wilaya, a elle-même été édifiée à l’époque française sur les ruines de l’antique Taghaste, dont ne subsistent que de rares vestiges, à l’instar des mosaïques exposés à l’Hôtel de ville. Toutefois, il est impératif de signaler le site de l’olivier de St Augustin, célèbre théologien natif de Taghaste. 

Il faut rappeler que cette région a de tous temps été l’objet des convoitises des empires qui se sont succédé dans le bassin méditerranéen. Ce sont ses terres fertiles qui en ont fait la renommée, puisque qu’on l’appelait le grenier à blé de Rome. Toutes ces périodes ont laissé d’importants sites historiques. De l’époque antique, on citera les plus importants à savoir les cités de Maudauros (Madaure), de Thubursicum Numidarum (Khemissa), de Tipasa de Numidie (Tifech), et de Thagura (Taoura). De l’époque byzantine subsistent des nombreuses citadelles, dont les plus remarquables sont celles de Madaure, Tifech et Taoura. A l’époque médiévale, la ville de Tifech jouait un rôle économique et culturel à l’échelle de la région. Plus prés de nous, on peut citer l’architecture coloniale de la ville de Souk Ahras, en particulier Hôtel de ville.

Thagura (Taoura) : un excellent pâturage pour les troupeaux à ce jour  / photo 2018

Hélas, cette richesse a souffert des atteintes du temps et des hommes. Les sites archéologiques, situés en pleine campagne, de Madaure, Khemissa, Tifech et Taoura ont été totalement délaissés, livrés au pillage des pièces archéologiques, au vandalisme et à l’inconscience des paysans locaux, qui labouraient les terres et y faisaient paître leurs troupeaux.

Heureusement, une politique novatrice de mise en valeur de l’ensemble de ces sites historiques a été lancée par la wilaya de Souk Ahras, à travers sa direction de la culture. Une stratégie d’ensemble a été proposée, visant à promouvoir collectivement ces sites à travers une mise en valeur et l’aménagement de circuits touristiques, retraçant notamment une partie du parcours de St Augustin. En effet, le tourisme culturel peut être un véritable levier économique majeur pour la wilaya. Par ailleurs, l’orientation de ce projet en direction de la population, grâce à la démarche de la conservation intégrée, qui est considérée comme le moyen le plus viable qui puisse permettre à ces sites d’assurer leur rôle social et culturel, tend à impliquer les acteurs locaux, et à assurer la survie de ces sites, en fournissant à ces derniers des revenus qui leur garantissent l’autonomie nécessaire à leur conservation.

Définition des interventions.

Madaure, Khemissa, Tifech et Taoura

Pour ces quatre sites antiques, la stratégie de mise en valeur a préconisé des interventions sur plusieurs niveaux. Leur caractère rural les prédispose à devenir des Parc Culturels, en accord avec la loi sur le patrimoine, et de les doter d’un plan de Définition des interventions gestion.

Pour cela, deux niveaux de réflexion ont guidé l’élaboration des études : la protection juridique et physique des vestiges, et leur présentation au public. Pour le premier point, la démarche fondamentale était de définir d’abord les périmètres archéologiques, et par conséquent les périmètres de protection et les champs de visibilité. Après les travaux de délimitation des sites, par le biais de l’aménagement de clôtures végétales, des travaux de protection provisoire, de dégagement des voies, et de remontage partiel des murs écroulés ont été effectués. Par ailleurs, pour assurer l’entretien après les travaux, un plan de gestion des sites a été proposé, qui définit précisément, après travaux et ouverture au public, toutes les actions à mener à court, moyen et long terme, pour assurer la sauvegarde des monuments et la conservation des sites dans leur ensemble.


Site de Madaure avant et après restauration

Le second aspect concerne la prise en charge des visiteurs. A partir de l’accueil des véhicules dans des parkings aménagées à cet effet à l’entrée des sites, la réception du public a lieu dans des pavillons conçus à cet effet, offrant des informations, des boutiques de souvenirs, ainsi que des sanitaires. L’accompagnement des touristes se fait par des guides, tout le long de leur visite, sur des chemins balisés, dans l’objectif de canaliser les flux pour éviter tout acte de détérioration. Les informations sur les monuments sont clairement énoncées sur des panneaux de signalisation : un grand panneau à l’entrée, présentant des données historiques sur l’ensemble du site, ainsi que des panneaux plus petits propres à chaque monument. Pour assurer la lecture des vestiges même durant la nuit, un éclairage de mise en valeur des structures antiques a été mis en place.

Pour les sites de Madaure et Khemissa, du fait de leur importance, le besoin de musée d u s i t e s ‘ e s t imposé. Pour le premier, ce sont les structures construites à l’époque coloniale qui ont été réhabilitées et réaménagées pour en faire, outre le musée de site, des espaces d’accueil pour les chercheurs. Quant à Khemissa, un nouveau musée a été conçu entre le site archéologique et le village de Khemissa afin d’accueillir les collections et objets archéologiques. Par ailleurs, ce qu’on appelait la Maison Forestière a été transformée en site d’accueil des chercheurs.

 


Vue de la ville à partir du site de St Augustin

Parallèlement à ces quatre sites ruraux, la ville de Souk Ahras, qui est le chef lieu de la wilaya, fait également partie du circuit touristique, puisque deux monuments majeurs de la ville méritent la prise en charge :

Site de l’olivier de St Augustin

Cet arbre légendaire, dont on dit que St Augustin avait coutume de s’abriter sous ses feuilles pour méditer, continue de recevoir des pèlerins du monde entier. St Augustin est né, rappelons-le, à Taghaste, et a étudié à Madaure. Le parcours qu’a effectué St Augustin passe par Guelma et Annaba avant Souk Ahras, et c’est la partie de ce circuit qui traverse la wilaya de cette dernière qui a été prise en charge dans le cadre de ce projet.

Le travail d’aménagement s’est basé sur la topographie du terrain et les structures existantes, par le biais d’un traitement exclusivement minéral, en pierres locales. Cette intervention discrète a pour objet l’effacement au bénéfice de l’olivier. Pour améliorer la progression vers l’éminence sur laquelle est juché l’olivier, un aménagement de rampes et d’escaliers a été proposé. Les pèlerins accomplissent ainsi une ascension graduelle vers cet olivier au tronc noueux, au branchage touffu et à l’ombrage généreux.


Vue en plan de l’esplanade du site de l’olivier de St Augustin

Hôtel de villede Souk Ahras

Édifié en 1887 par les Français au centre de la ville sur une parcelle de forme irrégulière, cet édifice se distingue par une architecture néoclassique. Construit en murs de pierres, de taille et de moellons, et couvert d’une charpente en bois revêtue de tuiles en ardoise, sa façade principale présente une riche palette de détails architectoniques : moulures, frises, niches, …. L’édifice est également le lieu d’une décoration intérieure soignée, comme le revêtement de sol du rez de chaussée, ainsi que les éléments métalliques à motifs floraux des garde-corps et balustrades.

 

Sérieusement dénaturé par les différents remaniements dont il a été le théâtre, il fait actuellement l’objet d’une réhabilitation qui lui redonnera sa grâce d’autrefois. Des travaux de réaménagement sont donc entrepris, pour le transformer en Musée de la ville, ouvert et accessible à tous. C’est lui qui sera le départ des circuits touristiques de la wilaya.

Amel HADJ HAMOU- M’HARI
Magazine Vies de villes 

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